Mélancolie d'automne, ou d'anniversaire...

Tout à l’heure, je quittais ce bâtiment au centre du site de Marcoule. Je revenais de l’atelier de reprographie, et marchais sur ce terre-plein central. Les yeux aux larges, où les deux anciens réacteurs expérimentaux dominaient les avants du Rhône, mon cerveau se mettait en mode nostalgie.

Me ramenant 9 ans en arrière, où l’élève ingénieur que j’étais effectuait un stage à Cogema, à l’atelier de traitement du linge de Marcoule. Mon bureau de stage étant en face de cet atelier de reprographie où j’allais ce matin, en tant que jeune cadre au badge bleu, passer une commande.
9 ans plus tard, je ne suis plus un élève, même si j’apprends toujours. Cogema n’existe plus. Et ce site est mon lieu de travail. Et tous les jours, lorsque je rentre au poste de garde, je prends conscience de ce bonheur que j’ai de voir le soleil se lever sur l’allée centrale, avec le Mont Ventoux en arrière plan…

Pour autant, je prends conscience aussi que depuis 9 ans, tellement de choses ont changé… J’avais 20 ans à l’époque, et la France venait de remporter sa coupe du monde de foot. Je nourrissais une ambition réelle. Garçon de droite, libéral, pensant qu’il fallait être le plus fort pour réussir, et tant pis pour les autres. La chanson de Goldman à fond dans ma ZX bordeaux, je me voyais le plus beau lorsque mes 30 ans arriveraient.
Mes 30 ans arrivent. Je ne suis pas plus beau que les autres. Je ne le regrette même pas. Néanmoins, le retour en arrière m’est quand même assez… Non pas douloureux, mais...

En 10 ans, je suis passé de mon école d’ingénieur lyonnaise à ce poste de cadre dans une grande entitée nationale, aprés un début de carrière à Marseille faisant suite à une pige à l’Isle Sur la Sorgues. Durant cette dernière, je me suis fait élire au conseil municipal de mon village. Avec une efficacité qui reste à prouver…
Durant ce septennat, j’aurais habité à Marseille, pour débuter ma vraie carrière d’ingénieur. Ensuite, de retour dans mon village, j’ai continué à écumer la France, pour « le boulot ». Ce boulot qui m’aura mis sur les rotules au sortir de l’année 2005. J’habitais à Sérignan du Comtat, maintenant je suis propriétaire à Roquemaure, le « village d’à coté », la capitale du canton.

Et moi durant ces 10 ans ? Je suis passé de l’état d’esprit de celui qui voulait tout bouffer à celui qui a réellement vu que ses limites étaient sans doute plus proches qu’il ne l’aurait espéré. J’ai connu un début de carrière honnête, mais qui ne restera pas dans les annales de mon école d’ingénieur. Politiquement, je ne suis rien. Et je n’ai même plus cette envie d’être plus. Finalement, ma vie personnelle et affective est sans doute ce qui aura le mieux fonctionné, ce qui n’était pas gagné. Au sortir de l’été 2002, le garçon de 24 ans que j’étais ne se doutait pas qu’il serait heureux sur ce point là. La douleur reste encore vive, mais je l’accepte, je vis avec. Je sais ce que j’ai perdu, encore plus lors de ces années suivantes. Mais je sais surtout ce que j’ai gagné. Et j’ai gagné, c’est indéniable. J’en reparlerai sans doute…

Et puis il y aura enfin les toujours éternels regrets. Mais je suis un éternel insatisfait. Aujourd’hui, Marseille et les années 2002-2004 me manquent. Mais quand j’étais à Marseille, c’était mes années d’étude lyonnaise qui me manquaient. Et à Lyon, je pleurais le Gard. J’ai bouclé la boucle, et pourtant en suis-je satisfait pour autant ?
Je mets, dans ce billet, des photos couleur sépia. Pas de grandes difficultés, PhotoFiltre est un logiciel d’une facilité déconcertante. Sépia, parce que mon village devient une histoire ancienne, quand bien même il m’aura donné ce pseudo, qui a remplacé le défunt FChaff un jour d’été 2002. Parce que Lyon, j’ai adoré, mais c’est tellement vieux ces dimanches à marcher Quai de Saône ou Parc de la Tête d’Or. Parce que même si je ne me sens pas réellement vieux, j’ai l’impression d’avoir derrière moi des moments que je ne reverrai jamais. Certains évènements personnels récents, qui m’ont touché, me validant cet état des choses. Certaines choses sont finies.

Bien sur, l’aventure continue. Et le couleur revient sur la photo de la tour carrée de mon village.

Je sais que pleins de belles choses m’attendent. Je ferai un jour le bilan de ces années de mes « vingt ans »… Quoique je l’ai déjà fait, ce bilan. C’était les années Chirac quelque part, mes années Chirac en tous cas. Sarkozy n’a pas ouvert qu’une nouvelle page pour la France, pour moi aussi. Politiquement, professionnellement, humainement, la page qui débute est différente de celles d'Octobre 97'.

Tout le monde change comme disent les poètes anglais...

Pas de tristesse chez moi. Simplement une mélancolie légère mais réelle. M’a-t-elle cependant un jour quittée, cette mélancolie ? Je n’en ai pas vraiment l’impression… La veille de mes 30 ans n’est finalement qu’un jour comme les autres où je soupire sur moi-même. Rien de nouveau sous le soleil, ou plutôt la grisaille.
Mais j’avoue que j’ai mal au ventre aujourd’hui… Ca fait un moment que j’ai mal au ventre… Peut être les 30 ans ne sont qu’un prétexte et la mauvaise raison, je ne sais pas... Mais ça, c’est un autre débat.

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire