Les 12 maisons de l'Elysée : Jean-Marie Le Pen

(2 maison en un jour, en forme le Seiya du Gard !)

6eme Maison. On arrive à la moitié, au Centre donc… Et dans le dessin animé éponyme, c’est la maison de la Vierge. Shaka, mes amis reconnaîtront… (« Quand j’ouvrirai les yeux, ouh, tu vas morfler, vilain »). Et donc logiquement, maison au centre, la Vierge… Ben Jean-Marie LePen bien sur ! Cherchez pas le rapport, y en a aucun. Mais voilà, fallait passer par la case LePen, pas la plus facile. Et bien allez, après Besancenot, faisons le grand écart… Jean-Marie LePen.

Jean-Marie LePen, tout a été dit sur lui. Personnellement, je ne l’aime pas. Je ne l’aime pas pour des raisons similaires, sans doute, à une majorité de 82 % des français qui l’ont rejeté en 2002. De ce point de vue là, sans doute suis « pensée unique », ou plutôt dominante, mais ça ne me dérange pas.
Non, plusieurs choses me déplaisent chez lui. La première étant celle que je déplore et que je condamne chez tout extrémiste, de gauche comme de droite, et qui est celui de provoquer et d’emmener un pays à la haine. Je reconnais aux extrêmes leurs légitimités, à défaut d’intérêt. Ils représentent un vote de contestation, pas de proposition. Mais c’est respectable. Sauf que personnellement, si je suis dans une phase de contestation, j’attends de la proposition, avant de l’action. Et j’attends surtout un rassembleur, pas un diviseur, pas quelqu’un qui oppose plusieurs France.

Après, bien sur que je ne valide pas ses nombreux excès. LePen ne serait pas LePen s’il n’y avait pas ces dérapages verbaux. De part ses dérapages (le dernier en date sur la « hongrititude » de Nicolas Sarkozy…), il a rendu pleins de sujets impurs et tabous. Oui, l’identité française est un sujet important. Oui, la place de la Nation au sein de l’Europe est importante. Oui, l’immigration est aussi un sujet important. Ces sujets, parce que l’on parle pour l’euro d’une « monnaie d’occupation », parce que l’on parle de races, parce que l’on montre du doigt une partie de la population d’origine étrangère, en deviennent tabous. C’est grave. C’est très grave. Je ne parle pas de ses propos négationistes sur la deuxième guerre mondiale, parce que là ça devient abjectement abject.
Sur ce point Laurent Fabius avait eu une phrase juste : « Le Pen pose des questions valables, mais propose des solutions abjectes ».

Et puis enfin, pour finir le pourquoi je ne peux pas être proche idéologiquement et intellectuellement de LePen, un dernier point. Des grands parents qui eurent été résistants (de gauche). Un imaginaire personnel que je me suis fait autour du Général de Gaulle, et de ces grands français qui ont fondé un pays que j’aime. Et une France que j’aime et qui me fait honneur quand elle s’oppose à la guerre en Irak, et quand elle appelle à la paix entre les peuples. Même si elle a un coté « donneuse de leçons » parfois insupportables, elle me fait plaisir.
Jean-Marie LePen, comme le dit Thierry le Luron dans la parodie de ma chanson préférée « souvenir attention danger », « est entouré par des légions de crânes rasés… ». Comme chez Arlette Laguiller, il y a dans l’appareil FN des gens qui ne sont pas des républicains comme moi. Des gens qui, en 62’, ont tenté un assassinat sur le Général de Gaulle. Des gens pour qui Pétain était un sauveur. Même si des membres proches de ma famille sont des « pieds noirs » et que je comprends leurs souffrances, l’Algérie française n’est pas pour moi une raison pour vouloir tuer de Gaulle et pour épouser des thèmes d’entre deux guerres. Et pour moi, Pétain n’est pas un héros. Loin s’en faut.

J’ai dit l’essentiel, et je ne dirais pas plus. Sauf que je veux revenir sur le 21 Avril 2002, que tout le monde visiblement a oublié, vu l’état d’excitation en ce moment dans la Campagne électorale. Parce que ça me tient à cœur aussi, et qu’un blog, c’est fait pour ça.

Le 21 Avril au soir, j’ai eu deux réactions en rentrant prendre une douche chez papa-maman à 19h40 avant d’aller à Roquemaure pour les résultats du canton. J’admets que quand j’ai vu Chirac et LePen, et pas Jospin, j’ai fait au début un « youpi » franc et joyeux. Et puis, pendant que papa était hilare que al gauche était out (il était de gauche aussi comme mes grands papas mais il a changé), je me suis vite rendu compte du « oups » et du « gloups ».

Je me souviens aussi du 6 Mai. A 19h55, j’étais devant les pompiers de Roquemaure, apportant les résultats de mon village à la Mairie principale du canton. Au bout de mon téléphone portable, une ancienne amie (qui me manque un peu mais qui ne veut plus me parler, tant pis…). J’y disais, à cette fille qui n’avait à l’époque pas l’age de voter et qui connaissait ma frustration de 1995’, que j’avais une grande peur. Que Chirac ait plus de 80 % des voix. Parce que j’avais peur de deux choses :
  • •Que Chirac soit incapable d’utiliser à bon escient, par un rassemblement républicain large et efficace, ses 80 %. La suite a prouvé que non, Chirac n’est pas un grand homme d’Etat, mais un politicien qui pèse 20 % des voix ;
  • Que la France se dise « ouf, c’est bon on a vaincu la bête », et que tout revienne comme avant. La preuve aujourd’hui… Le référendum européen n’y a rien fait, on a une campagne haineuse au possible, avec des combines d’appareil, une intolérance de tous les cotés… Il n’y a rien eu y a 5 ans.
Outre le souvenir pour moi de l’entre-deux tours qui reste pour moi un beau souvenir (personnel), je garde néanmoins un souvenir amer de ces révoltes pseudos-populaires, et de cette dictature médiatique et intellectuelle que l’on a eu. Il fallait tuer LePen, presque physiquement. J’ai été choqué de ces enfants qu’on envoyait dans les rues. J’ai été choqué de tous ces journalistes qui prenaient position. J’ai été choqué que Chirac refuse le débat d’entre deux tours. J’ai été choqué du traitement qui a été fait de l’information. J’ai vraiment été choqué, moi le gaulliste qui finalement ne détestait pas encore totalement Chirac, et qui avait voté pour lui au premier tour. Choqué parce que j’ai vu une haine pire que cette haine combattue, une intolérance de l’intolérance, qui n’était pas pour moi républicaine. Grave, très grave, et insultant pour les 20 % des français qui premier tour qui finalement n’étaient plus français, et devaient être tondus. Ces 20 % dont beaucoup provenaient des rangs de la gauche.

Hystérie collective à laquelle j’ai sans doute participé aussi. J’exagère ? J’ai relu il y a un an le très bon « Nos Délits d’Initiés » de notre ami Guy Birenbaum, qui est un grand et brillant observateur de notre vie politique. Il ne peut être suspect d’affection vis-à-vis du FN, et connaît bien le sujet pour y avoir consacré une thèse. Et bien Guy commençait son bouquin en parlant de ce malaise qu’il avait aussi ressenti. Il allait, racontait il, à une conférence entre les deux tours à la Sorbonne. Son idée était que voter blanc (c’était sa position) était tout à fait valable. Que le socle LePen ne dépassait pas 20%, 25% si y a un peu de vent de dos, et que fallait arrêter d’être hystériquement idiot. Résultat ? Devant cette pression d’une rare violence, Guy n’a pu que ânonner, en tribune, un « faut voter Chirac »… Et pourtant, Guy, c’est du courage en barre, et même si je n’adhère pas à toutes ses positions, c’est pour moi un modèle et un gars exemplaire. Mais là, la pression même pas populaire, mais bien réelle pourtant, a été trop forte.

Pour finir sur ce point là et sur ces évènements entre deux tours, la dernière raison pour laquelle je n’ai pas aimé ces manifestations et cette ambiance, outre son caractère anti-démocratique, était que les malades préféraient casser le thermomètre plutôt que de s’interroger sur la fièvre. Qui a fait son autocritique ? Pourquoi LePen et pas Jospin ? Pourquoi l’extrême droite à 20 %, l’extrême gauche à 10 %, et l’abstention à très haut ? Carrément incroyable que, à part de dire « c’est la faute à Papy Voise et à ceux qui ont mis l’insécurité dans le débat », personne, vraiment personne, n’ait fait une autocritique sérieuse. Médias, classes politiques, culturelles, intellectuels, économistes, industriels, personne n’a fait la moindre autocritique. Personne.
Alors oui, on disait sa peur et sa colère dans les rues. J’ai mal à la France, j’ai honte, etc… Mais qu’a-t-on fait depuis ? Facile de crier quand on a mal à la tête, mais il faut le soigner ce mal à la tête. Personne ne l’a fait. Depuis, dans mon canton, le FN a fait plusieurs fois 30 %. Et le NON est passé au dernier référendum. Toujours la faute des autres, jamais la sienne. Finalement, en réponse à ça, la réponse d’Hollande et de Chirac, c’est quoi ? Royal et Sarkozy ? Tout ça pour ça, ben mince alors… Non, ce manque de retour sur soi, c’est une faute. On verra ce que donne l’histoire au final… On verra.
J’ajoute qu’en tant que modeste élu, en tant que sympathisant politique local, je ne suis pas mieux que les autres, et je suis aussi responsable du LePen au deuxième tour. On est tous un peu responsable…

Non, je n’ai pas aimé cette ambiance (même si personnellement, ça allait plutôt bien…). Et pourtant je n’aime pas forcément LePen. Bref, je n’étais pas bien… J’en garde un souvenir amer, et je sais très bien que si LePen devait arriver au deuxième tour, on aurait une rebelote…

La haine n’engendre que la haine. Donc de ce point de vue là, LePen a eu une juste récolte… Mais quand la délicieuse Louise Bourgoin sur Canal + parle « d’allergie » quand elle présente la météo grimée devant LePen, ça me dérange un peu. Et j’avoue sans honte que si un jour je dois avoir LePen, Laguiller, Besancenot ou Schivardi devant moi et qu’ils me tendent la main, je leur la serrerai volontiers. Pourquoi de la haine ? Pourquoi ? Après, ça n’empêche pas les désaccords, profonds. Je serre la main aux quelques personnes du FN chez moi que je connais. Certains sont des mecs estimables même. Mais ensuite, politiquement, c’est un combat réel. Parce que je ne suis pas d’accord avec eux, parce que je n’aime pas le positionnement du FN et de son appareil.

Un dernier point politique, puisqu’on a dépassé un peu la simple personne de LePen (mais qu’y a-t-il de plus à dire que ce qui est dit par ailleurs ?). Certains fantasment des accords entre Sarkozy et LePen. Je ne suis pas UMP mais je fus, un peu, RPR. Il y eut au début des années 80 une alliance entre les gaullistes et le FN. Puis plus rien. Chirac a toujours été ferme sur ce point. Pasqua était plus ouvert sur un point : pour lui, traiter les électeurs FN de salops comme l’avait un jour fait Bernard Tapie (que j’adore) est une connerie monumentale. N’oublions enfin pas que les alliances droites – FN furent le fruit de la branche libérale de la droite. Millon, Blanc, Buhr, Soisson, et les gens du Var, étaient des libéraux proche de Madelin. Exception avec Jacques Peyrat, FN puis RPR.
Personnellement (et localement), je serais très furieux que des proches politiques passent des accords avec l’appareil FN. Certes, le PS passe des accords avec le PC, mais le PC n’est pas Lutte Ouvrière. Parlons avec De Villiers, why not. Pas avec Le Pen.

Donc sur ces soupçons de rapprochements Sarkozy – LePen ? Je ne sais pas, je ne m’appelle pas Brice Hortefeux. Mais pour l’instant, je crois qu’il ne faut pas confondre l’appareil FN avec l’électeur du FN. Je crois que nous devrions tous être ravis si des électeurs de LePen votent Sarkozy ou Bayrou au premier tour, et si des électeurs de Laguiller ou Besancenot votaient Royal. Après il y a les manières de ramener les brebis égarées à la bergerie… C’est vrai, et ça sera le débat sur maison « Sarkozy », un peu plus haut dans les marches de l’Elysée.
Maintenant, ça va de soit que personnellement, je prendrais très mal le fait et la présence de ministre issus du FN dans un gouvernement Sarkozy, ou des rapprochements officiels entre UMP et FN.

Allez, j’ai beaucoup parlé là sur le candidat LePen. J’avais à dire finalement. J’aurais pu dire plus, mais je ne sais pas synthétiser ma pensée. Je vais donc arrêter là. Ca va de soit, mais...

Non, je ne voterai pas JeanMarie Le Pen le 22 Avril.

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